Demande d’Avis n°255/SP/DAJ/OHADA/2015 du 21 avril 2015 du Secrétariat
Permanent de l’OHADA
AVIS N° 001 du 17 JUIN 2015
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA)
réunie en formation plénière à son siège le 17 juin 2015
Vu le Traité relatif à
l’harmonisation du droit des affaires en Afrique en ses articles 6 et 7 ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de
Justice et d’Arbitrage (CCJA) notamment en ses articles 9, 53, 54 et 58 ;
Vu la demande d’Avis consultatif du Secrétariat Permanent
de l’OHADA en date du 21 avril 2015 signée de Monsieur le Secrétaire permanent,
enregistrée au greffe de la Cour le
sous le numéro et tendant à
recueillir l’avis de la Cour sur le
projet d’Acte uniforme en révision portant organisation des procédures
collectives d’apurement du passif (AUPC) ;
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) s’est
réunie en formation plénière à Abidjan (République de Côte d’Ivoire), le 17
juin 2015 aux fins d’examiner, pour avis, le projet d’Acte uniforme en révision
portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif ;
Sur le rapport de Monsieur Idrissa YAYE, Juge ;
La Cour émet un avis favorable à l’adoption dudit projet
sous réserves des observations
tant préliminaires que de forme
et de fond ci-après :
I-
Observations préliminaires
I-1
Présentation
La Cour, conformément à ses avis
antérieurs, dont notamment ses avis n°1, 2 et 3 de l’année 1997 et n°1 de
l’année 1998, rappelle la présentation de l’Acte uniforme, omise dans le projet
à elle soumise. Elle propose la présentation ci-après :
ACTE
UNIFORME REVISE PORTANT ORGANISATION DES PROCEDURES COLLECTIVES D’APUREMENT DU
PASSIF
Le Conseil des Ministres de
l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA)
·
Vu
le Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, signé à
Port Louis le 17 octobre 1993, tel que révisé à Québec le 17 octobre 2008,
notamment en ses articles 2, 5 à 10 et 12 ;
·
Vu
le rapport du Secrétariat Permanent et les observations des Etats
Parties ;
·
Vu
l’avis n° en date du de la Cour Commune de Justice et
d’Arbitrage ;
·
Après
en avoir délibéré, adopte à l’unanimité des Etats Parties présents et votants,
l’Acte uniforme dont la teneur suit :
I-2
Pertinence de la procédure de conciliation
La Cour ne perçoit pas bien la nécessité et l’opportunité de
l’introduction d’une procédure de conciliation qui risque d’alourdir
inutilement la recherche de solutions aux difficultés de l’entreprise.
Procédure de conciliation susceptible de générer des frais qui vont alourdir le
passif de l’entreprise en difficulté. Il vaut mieux permettre, comme c’est le
cas actuellement, la saisine directe de la juridiction compétente dès
l’apparition des difficultés. La Cour fait remarquer, du reste, que la
procédure de règlement préventif est quasiment une forme de conciliation. La
Cour rappelle au surplus qu’un Acte uniforme sur la médiation et la
conciliation est en cours d’élaboration, lequel s’il est adopté deviendra le
droit commun de toute procédure de conciliation dans l’espace OHADA. Elle propose
en conséquence la suppression de tous les articles relatifs à la procédure de conciliation dans
le présent projet, notamment, les
articles 1-1, 1-2, 1-3 alinéa 1 et le chapitre I du titre II à savoir les
articles 5 jusqu’à l’article 5-14.
I-3
Pertinence de la création de la commission nationale
La Cour ne perçoit ni la pertinence ni
l’utilité véritable d’un tel organe national, elle note que, l’efficacité même
d’une telle commission est chimérique en raison, notamment, de sa composition
et du fait qu’elle ne siège que de manière épisodique et qu’elle ne soit pas
véritablement un organe des procédures collectives
Aussi, la Cour
propose la suppression des articles 4 jusqu’à l’article 4-37 créant cet organe
complexe et budgétivore ; elle plaide plutôt pour une spécialisation des
magistrats tant du siège que du parquet intervenant dans cette matière et un
renforcement du pouvoir de contrôle du juge-commissaire et du rôle de veille du
ministère public. La Cour souhaite également qu’un regard particulier soit
porté par le projet sur le profil des experts intervenant dans cette matière.
II-
Observations de fond ou de forme,
article par article
- L’article premier a été omis du projet
transmis, la Cour propose de le récupérer du tableau de bord et de modifier, dans un souci de cohérence,
ses dispositions ainsi qu’il suit : « Le présent Acte
uniforme, qui modifie et remplace l’Acte uniforme portant
organisation des procédures collectives d’apurement du passif du 10 avril
1998, a pour objet :
-d’organiser les
procédures ………. » ;
·
Article
1-1 : suivant la même logique expliquée dans le tableau de bord, la
Cour estime qu’il est aussi préférable,
dans un souci de précision, de viser également expressément les sociétés
coopératives dont la section 2, article
196 de l’Acte uniforme portant sociétés coopératives a prévu la liquidation
judiciaire, citée parmi les causes de dissolution de la société coopérative (
chapitre 1, section 1, article 177 de l’Acte uniforme portant sociétés
coopératives).
·
Article
1-3, in fine, la Cour propose d’harmoniser en reconduisant la définition du
journal d’annonces légales prévue à
l’article 257 de l’AUDCG GIE. Elle relève, d’autre part que, des
définitions, dont la suppression n’a pas été proposée par la plénière des
commissions nationales OHADA et qui
figurent sur le tableau de bord, n’ont pas été reprises à l’article 1-3 ;
elle s’interroge, s’il s’agit d’un oubli ou d’une suppression décidée par le
consultant ?
·
Article
3, La Cour propose le maintien des dispositions de l’article 3 actuel. La
juridiction étant un terme générique, il appartient à chaque Etat partie de désigner
ladite juridiction compétente en matière
de procédure collective.
·
L’article
3-1, in fine, et l’article 3-2, alinéa 4
et 5 se contredisent. La Cour propose la suppression de la dernière phrase de
l’article 3-1.
·
L’article
4-5 est une reprise des dispositions de
l’article 4-4, la Cour propose de
récupérer la bonne écriture de
l’article 4-5 dans le tableau de bord.
·
CHAPITRE III : CONDITIONS D’EXERCICE, la Cour propose d’ajouter, DES MANDATAIRES JUDICIAIRES
·
CHAPITRE V : RESPONSABILITÉ ET ASSURANCE
PROFESSIONNELLES, la
Cour propose d’ajouter également, DES
MANDATAIRES JUDICIAIRES
·
CHAPITRE I : LA CONCILIATION, la Cour propose la
suppression de l’article partitif « la » dans un souci
d’harmonisation.
·
Article
4-9, alinéa 2, la Cour s’interroge sur
l’intérêt d’une telle communication, pour laquelle aucune conséquence n’est tirée et propose la
suppression de cet alinéa.
·
Article
4, la Cour propose le maintien de l’article 4 actuel d’où sont tirés les articles
3-1 et 3-2 dont la suppression est
proposée par elle.
·
Article
4-15, la Cour propose la réécriture, afin d’assurer les garanties
d’indépendance, de neutralité et d’impartialité des experts au règlement
préventif et des syndics, ci-après : « Il est institué dans chaque
Etat Partie un ordre des experts au règlement préventif et des syndics.
L’exercice de la mission d’experts au
règlement préventif ou de syndics est incompatible avec toute autre activité de
nature à porter atteinte à son indépendance, sa neutralité et son impartialité.
Les cas d’incompatibilités visés à
l’alinéa précédent sont déterminés par chaque Etat Partie. ».
·
Article
5-14, la Cour propose la suppression du dernier alinéa de cet article qui parait superfétatoire.
·
Article
6, la Cour propose, dans un souci de cohérence,
la réécriture des alinéas 2 et 4, dudit article, fondus en un seul alinéa 2 ainsi
rédigé : « La Juridiction compétente est saisie par requête du
débiteur, adressée au président de la juridiction compétente et déposée au
greffe contre récépissé. ».
·
Article
11-1, remplacer « l’homologation du règlement préventif » par « l’homologation
du concordat préventif ».
- Article 14 alinéa 1, la Cour
propose, dans un souci de cohérence, la réécriture suivante : « Dans
les huit (08) jours du dépôt du rapport de l’expert, le président de la
juridiction compétente saisie convoque le débiteur à comparaître à une
audience non publique pour y être
entendu. Il convoque également à cette audience l'expert ainsi que tout créancier
qu'il juge utile d'entendre. Dans ce même délai, le débiteur peut saisir
lui-même la juridiction compétente.
- Article 15 alinéa 3 à supprimer,
car l’hypothèse prévue à l’article 11-1 doit être postérieure à
l’homologation du concordat préventif, elle ne peut donc être imaginée
ici. La Cour propose également d’éclater l’actuel alinéa 4 du projet en
deux alinéas. Le premier alinéa allant de « au cas où …… »
jusqu’à « parvenir à un accord. », le nouvel alinéa devant être
une reprise de l’alinéa 3 du texte actuel, mieux rédigé et ainsi
libellé : « Dans le cas où le concordat préventif comporte une
demande de délai n’excédant pas deux, ans , la juridiction peut rendre ce
délai opposable aux créanciers qui ont refusé tout délai et toute remise
sauf si ce délai met en péril l’entreprise de ces créanciers. ». La
Cour est pour la suppression de la
proposition de versement de 25% du montant au créancier non signataire du
concordat préventif qui aura pour effet de vider l’opposabilité du délai
de son sens.
- Article 32 in fine, écrire plutôt
« la juridiction compétente ne peut renvoyer l’affaire au
rôle général » au lieu de « inscrire ».
- Article 33 alinéa 4, supprimer le
mot « d’office ».
·
Article
40, afin de permettre à la juridiction de pouvoir s’autosaisir en respectant le
délai de 8 jours, la Cour fait la proposition de réécriture ci-après :
« Le juge-commissaire statue sur
les demandes, contestations et revendications relevant de sa compétence dans le
délai de huit (08) jours à partir de sa saisine. S'il n'a pas statué dans ce
délai, il est réputé avoir rendu une décision de rejet de la demande.
Les décisions du juge-commissaire sont
immédiatement déposées au greffe qui les notifie au président de la juridiction compétente, et par lettre au
porteur contre récépissé ou par lettre recommandée avec demande d’avis de
réception ou par tout moyen laissant trace écrite, y compris le courrier
électronique, à toutes personnes à qui elles sont susceptibles de faire grief.
Ces décisions peuvent être frappées
d'opposition formée par simple déclaration au greffe de la juridiction
compétente dans les huit (08) jours de leur dépôt ou de leur notification ou
suivant le délai prévu à l'alinéa premier du présent article. Pendant ce même
délai, la juridiction compétente peut se saisir d'office et réformer ou annuler
les décisions du juge-commissaire.
La juridiction compétente statue à la
première audience utile. ».
- Article 43, alinéa 2, la Cour
propose la suppression du bout de phrase : « selon la loi
de chaque État partie. » qui n’ajoute rien.
- Article 43, alinéa 5, la Cour fait
la proposition ci-après de réécriture dudit alinéa, afin d’exclure toute
périodicité laissée à la convenance du juge-commissaire :
« Le syndic a l’obligation de
remettre un rapport écrit sur sa mission et sur le déroulement de la procédure
de redressement ou de liquidation des biens au juge-commissaire au moins
une (01) fois tous les deux (2) mois et, dans tous les cas, chaque fois
que le juge-commissaire le lui demande. Il indique, en outre, dans son rapport,
le montant des deniers déposés au compte de la procédure collective ouvert dans
les conditions prévues par l'article 4-35 ci-dessus. ».
·
Article
44, la Cour estime que la convocation d’un représentant de la Commission
Nationale disposant d’un pouvoir disciplinaire est nécessaire si cet organe est
maintenu.
·
Article
51, la Cour propose le maintien de la disposition actuelle qui a le mérite de
n’exclure que les personnes impliquées dans la procédure.
·
Article
101, il y a un point (.) de plus à la fin qu’il convient de supprimer.
·
Article
145-4, alinéa 2, mettre un point (.) à la fin du texte.
·
Article
145-9, le début de l’article est un alinéa et ne peut commencer par un tiret.
·
Article
179-3, l’alinéa 1er de cet article mérite d’être supprimé car il est
superfétatoire, l’alinéa 2 devient alinéa 1 et doit commencer par « Le
syndic peut …. ».
·
Article
183in fine, remplacer « les moindres délais » par « les brefs
délais ».
·
Article
229, 6°), mettre un point (.) à la fin, au lieu d’une virgule (,).
·
Article
257, La Cour propose de ramener le bout de phrase « qui modifie et
remplace l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d’apurement du passif du 10 avril 1998 » à l’article 1 et la réécriture
du nouvel article 257 qui serait :
« Les
dispositions du présent Acte uniforme ne sont applicables qu'aux procédures
préventives et collectives ouvertes après son entrée en vigueur. ».
·
Article
256-24 et 256-25, la Cour préfère
l’expression « dans la mesure du possible » à « dans la mesure
possible ».
·
Article
256-28, 1°) remplacer le point virgule (;) par deux points (:) à la fin. Mettre
un point virgule (;) à la fin du 1°)-b). Mettre deux points ( :) à la fin
du 2°) en lieu et place du point virgule ( ;).
AVIS N°002/2015 DU 23 JUIN 2015
Séance du 23 Juin 2015
La Cour
Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA, réunie en formation plénière à
son siège le 23 juin 2015 ;
Vu le Traité
de Port-Louis du 17 Octobre 1993 relatif à l’Harmonisation du Droit des
Affaires en Affaires en Afrique, tel que
révisé à Québec le 17 octobre 2008, notamment en ses articles 10 et 14 ;
Vu le
Règlement de Procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, notamment
en ses articles 9, 53, 54, 55 et 58 ;
Vu la demande
d’avis consultatif de la République Démocratique du Congo formulée par courrier
en date du 25 septembre 2014 de Monsieur le Ministre de la Justice et des
Droits Humains, enregistré au Greffe de la Cour sous le n°002/2014/AC en date
du 14 octobre 2014, et ainsi libellée :
« 1.
INTRODUCTION
1.1. Par la présente, se
référant à l’article 14 du Traité de l’OHADA et aux articles 53 et suivants du
Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), la
République Démocratique du Congo a l’honneur de solliciter l’avis consultatif
de la haute juridiction sur diverses dispositions du droit uniforme se
rapportant à la transformation des sociétés commerciales, à la mise en harmonie
des statuts sociaux en période transitoire et au processus de régularisation
juridique.
1.2. En effet, l’article 14 du Traité du 17
octobre 1993 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, tel
que révisé le 17 octobre 2008 dispose :
« La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage assure l’interprétation et
l’application communes du Traité ainsi que des règlements pris pour son
application, des Actes uniformes et des décisions.
La Cour peut être consultée par tout Etat partie ou par le Conseil des
Ministres sur toute question entrant dans le champ de l’alinéa précédent. La
même faculté de solliciter l’avis consultatif de la Cour est reconnue aux
juridictions nationales saisies en application de l’article 13
ci-dessus ».
1.3. En outre, il résulte de l’article 54 du Règlement de procédure
de la Cour Commune de Justice et
d’Arbitrage du 18 avril 1996 modifié par le Règlement n°01/2014 du 30 janvier
2014 que :
« Toute demande d’avis consultatif émanant d’un Etat partie ou du Conseil
des Ministres est présentée par requête écrite. Cette requête formule, en
termes précis, la question sur laquelle l’avis de la Cour est sollicité. Il y
est joint tout document pouvant servir à élucider la question ».
1.4. L’Avis de la haute Cour communautaire permettra, le cas
échéant, de promouvoir la régularisation des sociétés commerciales qui, durant la période transitoire (12 septembre
2012 -12 septembre 2014), ont irrégulièrement accompli le devoir de mise en
harmonie des statuts sociaux.
1.5. Il sied de relever que l’article 50 de l’Acte uniforme relatif
au droit commercial général reconnaît à l’organe ou au greffe compétent la
possibilité de prendre des mesures correctives et décisoires nécessaires dans
un délai de trois mois :
« Dès réception du formulaire de demande d’immatriculation dûment
rempli et des pièces prévues par le présent Acte uniforme, le greffier ou le
responsable de l’organe compétent dans l’Etat partie délivre au demandeur un
accusé d’enregistrement qui mentionne la date de la formalité accomplie et le
numéro d’immatriculation.
Le Greffier ou le responsable de l’organe compétent dans l’Etat partie
dispose d’un délai de trois mois pour exercer son contrôle tel que prévu par
l’article 66 du présent Acte uniforme et le cas échéant notifier à la partie
intéressée le retrait de son immatriculation et procéder à sa radiation ».
1.6. La République
Démocratique du Congo remercie, à l’avance, la haute Cour de sa diligence dans
l’examen de la présente demande et de la suite qui en résultera.
2. CONTEXTE
2.1. La République Démocratique du Congo a adhéré à l’Organisation
pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) en date du 13
juillet 2012 par le dépôt de son instrument d’adhésion au gouvernement de la
République du Sénégal, Etat dépositaire du Traité de Port Louis.
2.2. Avant l’entrée en
vigueur du droit uniforme, en date du 12 septembre 2012, le droit congolais des
sociétés commerciales reposait essentiellement sur les textes suivants :
- Articles 446.1 à 446.6 du Code
civil livre III ;
- Décret du 27 février 1887 sur
les sociétés commerciales ;
- Arrêté royal du 22 juin 1926
sur la société par actions à responsabilités limitée (équivalent de la société
anonyme/SA belge, français et OHADA).
2.3. En vertu d’une
ordonnance du 14 mai 1886 (article 1er), il est permis, en cas de
lacune du droit, de recourir aux « principes généraux » du droit des
« pays civilisés » : « Quant
la matière n’est pas prévue par un décret, un arrêté ou une ordonnance déjà
promulgués, les contestations qui sont de la compétence des tribunaux du Congo
seront jugées d’après les coutumes locales, les principes généraux du droit et
l’équité ».
2.4. La pratique judiciaire
puise de temps à autre sur les droits belge et français, sans que ce procédé
soit systématique et dépasse le cadre des matières pouvant entrer dans la
catégorie des principes généraux du droit.
2.5. En tout état de cause,
comme l’a souligné l’auteur d’une thèse de doctorat (annexe 5 cote 40) :
« L’adhésion à l’OHADA entraine que les dispositions de ce dernier droit
devront s’appliquer dès l’instant où les Actes uniformes seront entrés en
vigueur en RDC ».
2.6. Avant l’avènement de
l’OHADA en République Démocratique du Congo, cinq types de sociétés
coexistaient en vertu des textes susvisés : société en nom collectif
(SNC), Société en Commandite simple (SCS), Société Privée à Responsabilité
Limitée (SPRL), Société par Actions à Responsabilité Limitée (SARL) et Société
Coopérative.
2.7. L’article 42 du décret du 27 février 1887 permet à la société
privée à Responsabilité Limitée (SPRL) de se transformer en une société d’une
autre forme juridique ; aucun autre texte législatif ou réglementaire ne
traite de la transformation des sociétés commerciales.
2.8. Malgré son acronyme
« SPRL », la SPRL congolaise est l’équivalente de la SPRL Belge et de
la Société à responsabilité limitée (SARL) OHADA ou française : les textes
sont similaires et les statuts sont semblables (à de rares exceptions près). De
même en est-il de la similarité entre la société par actions à responsabilité limitée (SARL) congolaise et
la Société anonyme (SA) belge, français ou OHADA (voir aussi infra n°2.10 et
annexe).
2.9. En réalité, la
législation régissant la SARL congolaise est lacunaire (trois articles dont un
seul véritablement usité). C’est l’arrêté royal du 22 juin 1926, dont l’article
1er 6°f alinéa 2, inséré par l’article 1er de l’arrêté
royal du 24 février 1985, dispose : « les
dispositions sub litteris c) t f) ci-dessus ne s’appliquent pas à l’acte
constitutif d’une société par actions à responsabilité limitée, spécialement et
exclusivement constituée soit afin de reprendre tout actif et le passif, ainsi
que l’ensemble des éléments de l’activité sociale d’une société anonyme belge
exerçant son activité au Congo, soit afin de reprendre une partie de l’avoir
social, ainsi que les éléments de l’activité sociale exercée au Congo, d’une
société anonyme belge exerçant une partie de son activité au Congo ».
2.10. En pratique, la
plupart des rédacteurs des statuts des sociétés par actions à responsabilité
limitée (SARL) se sont toujours inspirés des statuts des sociétés anonymes (SA)
belges et français.
2.11. Enfin, comme
l’illustre le récapitulatif en annexe 5, la doctrine congolaise a toujours mis
en évidence l’équivalence entre société par actions à responsabilité limitée
(SARL) congolaise et société anonyme (SA) belge, français ou OHADA ainsi que la
similarité entre société privée à responsabilité limitée (SPRL) congolaise et
SPRL belge ou SARL français et OHADA, malgré les différences d’acronymes.
2.12. L’article d’un praticien diffusé sur Internet (annexe 6) est
d’un avis différent et pose le postulat selon lequel le passage d’une société
par actions à responsabilité limitée (SARL) congolaise en société anonyme (SA)
OHADA requerrait une transformation de la forme juridique (parce que l’intitulé
« société par actions à responsabilité limitée » sera remplacé par
« société anonyme »).
2.13. Un professeur
d’université a également abondé dans le même sens en conseillant les entreprises
du portefeuille de l’Etat (vingt entreprises publiques transformées en société
commerciales depuis 2008), bien que sa thèse de doctorat proclame l’équivalence
entre SARL congolaise et S.A française et OHADA, sous réserve de quelques
nuances (annexe 5, cotes 27 et suivants).
2.14. Bien que minoritaires,
bon nombre de sociétés commerciales ont opté pour cette solution vers la fin de
la période transitoire (12 septembre 2014) durant laquelle les commerçants et
sociétés ont mis les conditions d’exercice de leur activité en harmonie avec le
droit OHADA.
2.15. Pourtant, selon les
recommandations de la Commission Nationale OHADA de la RDC
(« CNO-RDC »), la mise en harmonie consiste, pour les sociétés
commerciales, à se référer aux articles 908 et suivants pour, soit amender les
statuts, soit adopter de nouveaux statuts.
2.16. Dans la majorité des
cas, ce schéma a été suivi : une résolution de l’assemblée générale
extraordinaire décide de l’harmonisation des statuts (option sur la
méthodologie) et une seconde adopte, consécutivement à la résolution
précédente, les amendements ou, hypothèse très fréquente, la nouvelle rédaction
des statuts.
2.17. Il est des cas où une
seule résolution a suffi à la fois pur la méthodologie et l’adoption des
amendements ou des nouveaux statuts.
2.18. Certaines entreprises
ont choisi un processus en vertu duquel l’assemblée générale prend une première résolution déterminant la
méthodologie : option pour l’harmonisation par voie, soit d’amendements,
soit de nouvelle rédaction des statuts.
2.19. Ladite résolution se
limite strictement à la méthodologie, sans accomplir le processus de mise en
harmonie par l’adoption effective des amendements ou de nouveaux statuts.
2.20. Une seconde résolution déclare que
l’harmonisation des statuts rend obligatoire la transformation de la société
et, en conséquence, l’assemblée générale décide de transformer la société de la
forme juridique du droit congolais « société par actions à responsabilité
limitée » (SARL) en la forme « société anonyme » (SA) du droit
OHADA.
2.21. Cette résolution ne
repose ni sur la loi congolaise (qui, pour ce type de société, ne comporte
aucun article sur la transformation), ni sur le droit uniforme qui ne prévoit
pas ce mécanisme entre un droit national et le droit uniforme ou vice versa
(article 188 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et
du groupement d’intérêt économique). La résolution en question se fonde, non
pas sur des textes législatifs ou réglementaires ou encore sur le droit uniforme,
mais uniquement sur des statuts sociaux prévoyant que la « société par
actions à responsabilité limitée » (SARL) congolaise pourra se transformer
en « société anonyme » (SA) du droit OHADA.
2.22. Cette résolution et la
précédente ne semblent pas constituer la mise en harmonie prévue aux articles
908 et suivants de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales
et du groupement intérêt économique.
2.23. Une troisième
résolution, consécutive à celle décidant la transformation, porte sur
l’adoption des amendements ou de nouveaux statuts.
2.24. Il s’agit
probablement de la formalisation du processus de transformation, la mise en
harmonie prévue aux articles 908 et suivants de l’Acte uniforme relatif au
droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique n’étant
cependant pas accomplie.
3. QUESTIONS
3.1. Première thématique :
la transformation de la forme juridique des sociétés.
3.1.1. Textes
1°) Article 181 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique :
« La transformation de la société est l’opération par laquelle une
société change de forme juridique par décision des associés.
La transformation régulière d’une société n’entraîne pas la création
d’une personne morale nouvelle. Elle ne constitue qu’une modification des
statuts et est soumise aux mêmes conditions de forme et de délai que celle-ci.
Toutefois, la transformation d’une société dans laquelle la
responsabilité des associés est limitée à leurs apports en une société dans
laquelle la responsabilité des associés est illimitée est décidée à l’unanimité
des associés. Les délibérations prises en violation des dispositions du présent
alinéa sont nulles ».
2°) Article 184 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique :
« La décision de transformation met fin aux pouvoirs des organes
d’administration ou de gestion de la société.
Les personnes membres de ces organes ne peuvent demander des dommages
et intérêts du fait de la transformation ou de l’annulation de la
transformation que si celle –ci a été décidée dans le seul but de porter
atteinte à leurs droits ».
3°) Article 188 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique :
« Lorsque la société, à la suite de sa transformation, n’a plus l’une des
formes sociales prévues par le présent Acte uniforme, elle perd la personnalité
juridique si elle exerce une activité commerciale ».
4°) Article 911 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique :
« la transformation de la société ou l’augmentation de son capital par un
moyen autre que l’incorporation de réserves, de bénéfices ou de primes
d’apports, d’émission ou de fusion, ne peut être réalisée que dans les
conditions normalement requises pour la modification des statuts ».
3.1.2. Questions
1°) Quelle définition doit-on
retenir de la « transformation » en droit uniforme ?
2°) Faut-il distinguer deux types
de transformation : la transformation « classique » (changement
de la forme de la société) et la transformation « moderne » ou
« récente » (consistant en fusion, scission ou modification de
l’objet social, du capital, etc.) ?
3°) Faut-il, au contraire, se
limiter à reconnaître et distinguer les conceptions suivantes :
transformation, opérations de concentration/restructuration et simples
modifications des statuts ?
4°) Un changement d’acronyme dans
le processus de mise en harmonie des statuts (par exemple, la « société
privée à responsabilité limitée » /SPRL congolaise équivalente à la
« société à responsabilité limitée » /SARL de l’OHADA) constitue-t-il
une transformation de société ?
5°) En d’autre termes, le fait de
mettre en harmonie les statuts sociaux d’une société privée à responsabilité
limitée (SPRL) congolaise en l’instituant « Société à responsabilité
limitée » (SARL) dans les nouveaux statuts (mis en harmonie)
constitue-t-il une transformation ou une simple adaptation découlant du
processus établi par les articles 908 et suivants de l’Acte uniforme relatif au
droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique ?
6°) L’article 188 de l’Acte
uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt
économique justifie-t-il ou non la transformation d’une société de droit
national en une société de droit uniforme et vice versa ?
7°) Le passage d’une forme
juridique du droit national (par exemple, société par actions à responsabilité
limitée / SARL) à une forme du droit uniforme (par exemple, société anonyme /
S.A ou société par actions simplifiée/ SAS) est-il possible ?
8°) Le passage évoqué à la
question précédente est-il réalisable si les statuts sociaux l’ont prévu,
malgré le silence de la loi nationale en cette matière ?
9°) Ce passage serait-il
envisageable si le principe de transformation d’une forme de société en une
autre est reconnu par la loi nationale ?
10°) Cette mutation d’une forme
juridique de droit national en une forme juridique OHADA équivalente ou différente,
ou vice versa, est-elle concevable, malgré les termes de l’article 188 de
l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement
d’intérêt économique ?
11°) Pour comparaison, la partie
anglophone du Cameroun a-t-elle recouru à la transformation de la société
camerounaise équivalente à la SARL (ou de celle équivalente à la SA) de l’OHADA
en SARL (ou SA), ou la mise en harmonie prévue à l’article 908 a pu
suffire ?
12°) Qu’en a-t-il été de la
Guinée Bissau et de la Guinée Equatoriale ?
3.2. Deuxième thématique : la mise en harmonie des statuts en
période transitoire.
3.2.1. Textes
1°) L’article 908 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique :
« Les sociétés et les groupements d’intérêt économique constitués
antérieurement à l’entrée en vigueur du présent Acte uniforme sont soumis à ses
dispositions. Ils sont tenus de mettre leurs statuts en harmonie avec les
dispositions du présent Acte uniforme dans un délai de deux ans à compter de
son entrée en vigueur.
Les sociétés en commandite par actions existant régulièrement dans l’un
des Etats parties devront être transformées, dans ce même délai de deux ans, en
sociétés anonymes sous peine d’être dissoutes de plein droit à l’expiration
dudit délai ».
2°) l’article 909 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique :
« La mise en harmonie a pour objet d’abroger, de modifier et de
remplacer, le cas échéant, les clauses statutaires contraires aux dispositions
impératives du présent acte uniforme et de leur apporter les compléments que le
présent acte uniforme rend obligatoire ».
3°) L’article 910 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique :
« La mise en harmonie peut être accomplie par voie d’amendement
aux statuts anciens ou par l’adoption de statuts rédigés à nouveau en toutes
leurs dispositions ».
4°) L’article 911 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales
et du groupement d’intérêt économique :
« La transformation de la société ou l’augmentation de son capital par un
moyen autre que l’incorporation de réserves, de bénéfice ou de primes
d’émission, ne pourra être réalisée que dans les conditions normalement
requises par la modification des statuts ».
5°) L’article 919 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique (1997) :
« Sont abrogées, sous réserve de leur application transitoire pendant une
période de deux ans à compter de la date d’entrée en vigueur du présent Acte
uniforme, aux sociétés n’ayant pas procédé à la mise en harmonie de leurs
statuts avec les dispositions du présent Acte uniforme, toutes dispositions
légales contraires aux dispositions du présent Acte uniforme.
Toutefois, nonobstant les dispositions de l’article 10 du présent Acte
uniforme, chaque Etat partie pourra, pendant une période transitoire de deux
ans à compter de l’entrée en vigueur du présent Acte uniforme, maintenir sa
législation nationale applicable pour la forme de l’établissement des
statuts ».
6°) L’article 919 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciale et du groupement d’intérêt économique (2014).
« Est abrogé, sous réserve de son application transitoire pendant
une période de deux (2) ans à compter de la date d’entrée en vigueur du présent
Acte uniforme, aux sociétés n’ayant pas procédé à la mise en harmonie de leurs
statuts avec les dispositions du présent Acte uniforme, l’Acte uniforme du 17 avril
1997 relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt
économique ».
3.2.2. Questions
1°) Quelle définition doit-on
retenir de la « mise en harmonie des statuts » ?
2°) Le processus de mise en
harmonie prévu par les articles 908 et suivants AUSCGIE rend-elle obligatoire
la transformation de la société, par cela seul que l’acronyme « société
par actions à responsabilité limitée » en droit national deviendra
« société anonyme » en droit uniforme (alors que les statuts révèlent
la similarité entre « société par actions à responsabilité limitée »
congolaise et « société anonyme » de l’OHADA) ?
5°) Au regard de l’article 919 de
l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement
d’intérêt économique daté du 17 avril 1997, auquel renvoie le même Acte
uniforme en sa version du 30 janvier 2014, peut-on considérer que l’absence de
disposition légale ou réglementaire nationale sur la transformation qui
auraient pu s’appliquer aux sociétés n’ayant pas encore harmonisé leurs
statuts, rend applicable l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique depuis son entrée en vigueur
en RDC, singulièrement durant les deux années de la période transitoire, tout
au moins en matière de transformation ?
6°) Cette solution reste-t-elle
la même lorsque le régime particulier (dispositions légales ou réglementaires)
auquel est soumis la société concernée ne prévoit rien sur la
transformation ?
7°) Dans l’affirmative, l’article
184 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement
d’intérêt économique met-il fin aux pouvoirs des organes d’administration ou de
gestion des sociétés ayant décidé, par le biais de l’assemblée générale, leur
transformation en une société d’une autre forme ?
8°) Si ces sociétés sont passées
outre certaines conditions de fond ou de forme ou si elles ont omis de déposer
un exemplaire du procès-verbal de nomination des nouveaux dirigeants sociaux,
comme l’exige l’article 265 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique, l’article 184 du même Acte
uniforme s’applique-t-il encore ?
3.3. Troisième thématique : la régularisation du défaut de mise en
harmonie
3.3.1. Textes
1°) l’Article 1er alinéa 5 de l’Acte uniforme relatif au
droit commercial général :
« Passé ce délai, tout intéressé peut saisir la juridiction
compétente afin que soit ordonnée cette régularisation, si nécessaire sous
astreinte ».
2°) L’article 68 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial
général :
« Faute par un assujetti à une formalité prescrite au présent Acte
uniforme de demander celle-ci dans le délai prescrit, la juridiction compétente
ou l’autorité compétente dans l’Etat partie, statuant à bref délai, peut, soit
d’office, soit à la requête du greffe ou de l’organe compétent dans l’Etat
partie en charge du Registre du Commerce et du Crédit Mobilier ou de tout autre
requérant, rendre une décision enjoignant à l’intéressé de faire procéder à la
formalité en cause.
Dans les mêmes conditions, la juridiction compétente ou l’autorité
compétente dans l’Etat partie peut enjoindre à toute personne physique ou
morale immatriculée au Registre du commerce et du crédit mobilier de faire
procéder :
- soit aux mentions complémentaires ou rectificatives soumises ;
- soit aux mentions ou rectifications nécessaires en cas de déclaration
inexacte ou incomplète ;
- soit à sa radiation ».
3°) L’article 75 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique :
« Si les statuts ne contiennent pas toutes les mentions exigées
par le présent Acte uniforme ou si une formalité prescrite par celui-ci pour la
constitution de la société a été omise ou irrégulièrement accomplie, tout
intéressé peut demander à la juridiction compétente, dans le ressort de
laquelle est situé le siège social, que soit ordonnée, sous astreinte, la
régularisation de la constitution. Le ministère public peut également agir aux
mêmes fins ».
4°) L’article 247 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique :
« La juridiction compétente saisie d’une action en nullité peut, même
d’office, fixer un délai pour permettre de couvrir la nullité. Elle ne peut pas
prononcer la nullité moins de deux (2) mois après la date de l’exploit introductif
d’instance.
Si, pour couvrir une nullité, une assemblée doit être convoquée et s’il
est justifié d’une convocation régulière de cette assemblée, la juridiction
compétente accorde le délai nécessaire pour que les associés puissent prendre
une décision.
Si à l’expiration du délai prévu aux alinéas précédents, aucune
décision n’a été prise, la juridiction compétente statue à la demande de la
partie la plus diligente ».
5°) L’article 63 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
coopératives :
« Si les statuts ne contiennent pas toutes les énonciations
exigées par le présent Acte uniforme ou si une formalité prescrite par celui-ci
pour la constitution de la société coopérative a été omise ou irrégulièrement
accomplie, tout intéressé peut demander à la juridiction compétente ou à
l’autorité administrative compétente dans le ressort de laquelle est situé le
siège social, que soit ordonnée la régularisation de la constitution. Le
ministère public peut également agir aux mêmes fins ».
6°) L’article 200 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
coopératives :
« Le tribunal saisi d’une action en nullité peut, même d’office, fixer un
délai pour permettre de couvrir la nullité. Il ne peut pas prononcer la nullité
moins de deux mois après la date de l’exploit introductif d’instance.
Si à l’expiration du délai prévu à l’alinéa précédent aucune décision
n’a été prise, le tribunal statue à la demande de la partie la plus
diligence ».
3.3.2. Questions
2°) A supposer que la juridiction
compétente ordonne la régularisation sur la base de l’article 1er
alinéa 5 ou de l’article 68 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial
général, doit-elle convoquer l’assemblée générale qui décidera les
modifications des statuts nécessitées par le processus de régularisation ?
3°) L’Acte uniforme relatif au
droit des société coopératives ne contenant pas d’équivalent de l’article 1er
alinéa 5 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général, doit-on
procéder à la régularisation, le cas échéant, en se fondant sur l’article 63
(équivalent de l’article 75 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique) qui semble se limiter au
seul cas de la constitution de la société ?
4°) L’article 75 de l’Acte
uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt
économique peut-il servir de fondement à une régularisation juridique
nécessitée par un défaut de mise en harmonie des statuts sociaux ?
5°) L’article 247 de l’Acte
uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt
économique peut-il servir de fondement à une régularisation juridique
nécessitée par un défaut de mise ne harmonie des statuts sociaux, notamment
(mais non exclusivement) lorsque le procès-verbal consignant les délibérations
de l’assemblée générale comporte un vice pouvant justifier la sanction de
nullité ?
6°) La réponse à la précédente
question est-elle transposable, mutatis mutandis, au cas des sociétés
coopératives en vertu des dispositions pertinentes régissant cette
matière ? » ;
Vu les observations de la
République du Congo en date du 09 février 2015, enregistrées au Greffe de la
Cour de céans le 18 février 2015 ;
Vu les observations de la
République du Togo en date du 20 avril 2015, enregistrées au Greffe de la Cour
de céans le 11 mai 2015 ;
Vu les observations de la
République du Benin en date du 07 mai 2015, enregistrées au Greffe de la Cour
de céans le 27 mai 2015 ;
Sur le
rapport de Monsieur DJIMASNA N’DONINGAR, Juge ;
EMET L’AVIS
CI-APRES :
I – Première thématique : la
transformation de la forme juridique des sociétés
Sur
la première et la deuxième questions
La
transformation de la société, au sens de l’article 181 de l’Acte uniforme
relatif au droit des sociétés commerciales et du G.I.E, est l’opération par
laquelle les associés, ayant opté initialement pour une forme sociale donnée,
dans les limites des prévisions légales, décident d’abandonner cette forme au
profit d’une forme nouvelle mieux adaptée à leurs besoins, choisie impérativement
parmi les formes sociétales autorisées dans l’espace OHADA dont la liste
exhaustive est dressée à l’article 6, alinéa 2 de l’Acte uniforme précité.
Les opérations
de fusion, de scission, de modification de l’objet social ou du capital social
ne sont pas des opérations de transformation au sens de l’article 181
ci-dessus.
Sur
la troisième question
Les
opérations de transformation, de concentration, de structuration et de
modification des statuts sont des opérations de nature différente qui peuvent
affecter la société commerciale au cours de sa vie sociale, avec un sens et une
portée différents pour chaque opération, même si l’une de ces opérations peut
entraîner une autre.
Cette opération
ne sera pas qualifiée de transformation si les caractéristiques de la nouvelle
société choisie sont identiques à celles de la société initiale et n’entraîne
pas de changement de la forme juridique.
Sur
la sixième, septième, huitième, neuvième et dixième questions
L’article 188
de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et du G.I.E
prévoit la perte de la personnalité juridique pour une société commerciale qui,
à la suite d’une transformation, n’a plus une forme sociale prévue par l’Acte
uniforme. Cela implique qu’une société de droit national n’ayant pas une forme
sociale prévue par l’Acte uniforme susvisé doit impérativement subir une
transformation pour acquérir une forme sociale prévue par cet Acte uniforme si
elle exerce une activité commerciale, au risque de perdre sa personnalité
juridique, qualité qui lui permet d’être titulaire de droits et de devoirs.
Le passage
d’une forme juridique du droit national à une forme juridique du droit uniforme
OHADA est possible et réalisable si les statuts sociaux l’ont prévu, malgré le
silence de la loi nationale, ou même en cas de reconnaissance de cette
opération par la loi nationale, dans la mesure où à partir de l’entrée en
vigueur du droit uniforme OHADA, ce n’est plus cette loi nationale qui
s’applique en matière de sociétés commerciales, mais l’Acte uniforme relatif au
droit des sociétés commerciales et du G.I.E, lequel prévoit cette opération de
transformation en ses articles 181 à 188.
Sur
la onzième et la douzième questions
II – DEUXIEME
THEMATIQUE : LA MISE EN HARMONIE DES STATUTS EN PERIODE TRANSITOIRE
La mise
en harmonie des statuts est une opération qui consiste à rendre conformes les dispositions
statutaires d’une société préexistante à celles impératives de l’Acte uniforme
révisé relatif au droit des sociétés commerciales et du G.I.E, soit par
l’élaboration de nouveaux statuts, soit par la modification des statuts
existants ou par le remplacement de certaines clauses de ces statuts.
L’opération
de mise en harmonie des statuts ne rend pas obligatoire la modification de la
forme juridique de la société, mais peut parfois l’entraîner ou la nécessiter.
La modification
de la forme juridique de la société ne se limite pas seulement au changement
d’acronyme de cette société, mais s’accompagne éventuellement d’une mise en
harmonie des statuts pour les rendre conformes aux dispositions impératives de
l’Acte uniforme. Un changement d’acronyme non suivi d’une mise en harmonie des
statuts aura pour conséquence que les clauses statutaires contraires aux
dispositions impératives de l’Acte uniforme révisé seront réputées non écrites.
Sur
la quatrième question
La seule
référence pour les opérations de transformation ou de mise en harmonie des
statuts des sociétés pendant la période transitoire est l’Acte uniforme révisé
à l’exclusion de toute disposition du droit interne d’un Etat partie. L’article
919 de l’Acte uniforme révisé permet seulement la survivance durant la période
transitoire de deux (2) ans, à partir de son entrée en vigueur, des
dispositions de l’Acte uniforme du 17 avril 1997 relatif au droit des sociétés
commerciales et du G.I.E, qui est normalement abrogé, pour les sociétés qui
n’auraient pas mis en harmonie leurs statuts durant cette période.
L’article
919 de l’Acte uniforme du 17 avril 1997 relatif au droit des sociétés
commerciales et du G.I.E prévoit la survivance des dispositions nationales pour
les sociétés n’ayant pas procédé à la mise en harmonie de leurs statuts avec
les dispositions de cet Acte uniforme durant la période transitoire de deux (2)
ans à compter de son entrée en vigueur. En l’absence de dispositions nationales
légales ou réglementaires sur la transformation, seules prévalent les
dispositions des articles 181 à 188 de l’Acte uniforme relatif au droit des
sociétés commerciales et du G.I.E qui réglementent la transformation de la
société commerciale. Cette solution est la même pour les sociétés soumises à un
régime particulier dont traite l’article 916 de l’Acte uniforme de 1997
susmentionné.
Sur
la septième et la huitième questions
La
décision de transformation met fin aux pouvoirs des organes d’administration ou
de gestion des sociétés ayant décidé leur transformation en une société d’une
autre forme, au regard de l’article 184 de l’Acte uniforme relatif au droit des
sociétés commerciales et du G.I.E révisé.
Les formalités
prévues à l’article 265 de l’Acte uniforme ne sont nécessaires que pour
l’opposabilité aux tiers de la décision de transformation et de désignation des
nouveaux organes sociaux. Les effets de l’article 184 restent intacts, même en
cas d’omission de ces formalités, sauf l’inopposabilité de cette décision aux
tiers.
III – TROISIEME THEMATIQUE :
LA REGULARISATION DU DEFAUT DE MISE EN HARMONIE
Sur
la première et la deuxième questions
Si,
à la suite de la décision de transformation de la société, des formalités ont
été omises ou mal accomplies, toute personne intéressée ou le ministère public
peut demander la régularisation de ces formalités, comme la juridiction
compétente peut d’office l’ordonner.
Si la décision
prise par la juridiction compétente ordonnant la régularisation nécessite la
convocation d’une assemblée générale pour décider des modifications des statuts
nécessitées par le processus de régularisation, un mandataire judiciaire ou ad
hoc peut être nommé à cet effet.
Sur
la troisième question
L’article 63
de l’Acte Uniforme relatif au droit des sociétés coopératives ne peut servir de
fondement à la régularisation nécessitée par le défaut de mise en harmonie des clauses
statutaires prévue par l’article 390, que si l’action intervient dans la
période des deux (02) ans prescrite pour la mise en harmonie des statuts.
L’article
75 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du G.I.E ne
peut servir de fondement à la régularisation nécessitée par le défaut de mise
en harmonie des statuts sociaux prévue par l’article 908, que si l’action
intervient dans la période des deux (02) ans prescrite pour la mise en harmonie
des statuts.
Sur
la cinquième et la sixième questions
L’article
247 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du G.I.E
ne peut pas servir de fondement à une régularisation juridique nécessité par un
défaut de mise en harmonie des statuts sociaux que si l’action intervient dans
la période des deux (02) ans prescrite pour la mise en harmonie des statuts.
Cette
préconisation ne peut être transposée aux sociétés coopératives, lesquelles sont
soumises à l’Acte Uniforme relatif au droit des sociétés coopératives dont les
dispositions sont d’ordre public.
Le présent
Avis a été émis par la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage en sa séance du 23
juin 2015 à laquelle étaient présents :
Demande d’Avis n° 001/2015/AC de la République du BENIN
AVIS N° 03/2015 du 05 novembre 2015
SEANCE DU 05 NOVEMBRE 2015
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de
l’OHADA, réunie en formation plénière à
son siège le 05 novembre 2015,
Vu le Traité relatif à
l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, notamment en ses articles 10
et 14 ;
Vu le
Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA),
notamment en ses articles 9, 53, 54, 55 et 58 ;
Vu la demande d’avis consultatif
de la République du BENIN, présentée par lettre n° 0838/MJLDH/DC/SGM/DLCS/SP-C
en date du 23 décembre 2014 du Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, de la
Législation et des Droits de l’Homme, enregistrée au greffe de la Cour le 12 janvier
2015 sous le n°001/2015/AC, et libellée en ces termes :
« En
application des dispositions de l’article 14 alinéas 1 et 2 du Traité du 17
octobre 1993 relatif à l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires tel que
révisé à Québec le 17 octobre 2008, et de l’article 54 du Règlement de
procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, j’ai l’honneur de
soumettre à la Cour la présente au nom de l’Etat de la République Bénin en vue
d’obtenir votre avis consultatif sur les problèmes posés par le concours du
Système Comptable Ouest Africain (SYSCOA) et de l’Acte uniforme portant organisation
et harmonisation des comptabilités des entreprises et son annexe, le Système
Comptable OHADA.
FAITS ET
PROCEDURE :
Le 24 mars
2000, le Conseil des Ministres de l’Organisation pour l’Harmonisation en
Afrique du Droit des Affaires (OHADA) a adopté l’Acte uniforme portant
organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises.
L’article 113
de cet Acte uniforme dispose « Le
présent Acte uniforme auquel est
annexé le Système comptable OHADA sera publié au Journal Officiel de l’OHADA et
des Etats parties. Il entrera en vigueur :
- pour les
« comptes personnels des entreprises », le 1er janvier
2001 : opérations et comptes de l’exercice ouvert à cette date ;
- pour les
« comptes consolidés » et les « comptes combinés », le 1er
janvier 2002 : opérations et comptes de l’exercice ouvert à cette
date ».
Les entreprises installées dans l’un quelconque des
Etats parties au Traité de l’OHADA sont donc tenues d’harmoniser leur
comptabilité selon les règles du droit comptable du système comptable OHADA.
L’OHADA confirme ainsi la force obligatoire des Actes uniformes et leur
supériorité sur les normes juridiques existantes et mêmes futures (cf. article
112 de l’Acte uniforme).
Tenant compte de cette évolution juridique dans
l’espace de l’OHADA, et en vue d’assurer la compatibilité du Système comptable
de l’UEMOA avec l’Acte uniforme de l’OHADA portant organisation et
harmonisation des comptabilités des entreprises, un nouveau Règlement
n°72001/CM/UEMOA du 20 septembre 2001 a été adopté par l’UEMOA. Il a pour objet
de modifier les articles 11, 13, 38, 56, 70, 72, 73, 74, 89, 97, 98, 103, 104,
108 et 111 du Règlement n°04/96/CM/UEMOA du 20 décembre 1996 portant adoption
d’un référentiel comptable commun au sein de l’UEMOA.
Depuis lors, le système comptable de l’UEMOA et celui
de l’OHADA coexistent, étant entendu qu’il n’existe aucune disposition
contraire du Système Comptable UEMOA par rapport à celui de l’OHADA.
Mais le 28 juin 2013, l’UEMOA, après révision du
Système Comptable de l’Ouest Africain (SYSCOA), a adopté un nouveau Règlement
n°5/CM/UEMOA modifiant le Règlement n°04/96/CM/UEMOA du 20 décembre 1996
portant adoption d’un Règlement comptable commun au sein de l’UEMOA. Ce système
comptable a apporté des modifications substantielles aux articles 8, 11, 13,
25, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 37, 38, 45 et 54 du système comptable de
l’UEMOA préexistant.
Désormais force est de constater que le système
comptable de l’UEMOA est contraire, tant dans la forme que dans le fond à celui
institué par l’Acte uniforme de l’OHADA portant organisation et harmonisation
des comptabilités des entreprises.
Pourtant, ce nouveau système comptable de l’UEMOA a
été mis en exécution par le Règlement d’exécution n°005/2014/COM/UEMOA portant
détermination des modalités d’application du référentiel comptable commun au
sein de l’UEMOA en date du 30 mai 2014 pour prendre effet à compter du 1er
janvier 2014.
Le droit comptable devient ainsi aléatoire dans
l’espace territorial couvert à la fois par l’UEMOA et l’OHADA. Une telle
situation place les entreprises dans le désarroi parce que les principes
comptables et la nomenclature des états financiers ont été substantiellement
modifiés et ne sont plus conformes aux règles du droit OHADA auxquelles se
réfère le commissaire aux comptes pour la certification des comptes des
entreprises dans l’espace OHADA.
La coexistence dans l’espace OHADA d’un autre
référentiel contraire à celui de l’OHADA peut conduire à l’insécurité
juridique ; ce qui pourrait remettre en cause le principe d’harmonisation
posé par le Droit OHADA.
La Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement
(CCEG) de l’OHADA, qui s’est tenue à Ouagadougou le 17 octobre 2013, a relevé
la contrariété des deux référentiels comptables dans l’espace géographique OHADA
et instruit le Conseil des Ministres de poursuivre la révision de l’Acte
uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises
pour en faire « l’unique
référentiel en vigueur dans les Etats
parties ».
A la suite du CCEG, le Conseil des Ministres de
l’OHADA qui s’est tenu les 30 et 31 janvier 2014 à Ouagadougou a rappelé la
résolution prise par les Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’OHADA à
l’occasion de leur réunion du 17 octobre 2013, en vertu de laquelle le système
comptable OHADA « devait constituer
l’unique référentiel comptable en vigueur dans l’espace OHADA » et
« invité toutes les instances
concernées à s’y conformer ».
Il reste que l’unification décidées par la Conférence
des Chefs d’Etats et de Gouvernement n’est pas réalisée à ce jour.
C’est pourquoi, la République du Bénin sollicite
l’avis de la Haute Cour de céans sur les questions suivantes :
Question 1 :
L’article 112 de l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des
comptabilités des entreprises impose-t-il la supériorité des règles de l’OHADA
sur les règles et les systèmes comptables existants et futurs ?
Question 2 : Quel système comptable appliquer
dans les Etats parties au Traité relatif à l’Organisation pour l’Harmonisation
en Afrique du Droit des Affaires ?
B-
Selon l’Acte
Uniforme de l’OHADA portant sur le Droit Commercial Général :
Article 13 : « Tout
commerçant, personne physique ou morale, doit tenir un journal enregistrant au
jour le jour ses opérations commerciales.
Il doit
également tenir un Grand Livre, avec balance générale récapitulative, ainsi
qu’un livre inventaire.
Ces livres
doivent être tenus conformément aux dispositions de l’Acte uniforme relatif
à l’organisation et à l’harmonisation
des comptabilités des entreprises
Tout
commerçant, personne physique ou morale, doit en outre respecter les
dispositions prévues par l’Acte uniforme relatif au Droit des sociétés
commerciales et des groupements d’intérêt économique, et l’Acte uniforme
relatif à l’organisation et l’harmonisation des comptabilités des
entreprises ».
C- Selon l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêt économique.
Article
137 : « A la clôture de chaque exercice, le gérant ou le conseil
d’administration ou l’administrateur général, selon le cas, établit et arrête
les états financiers de synthèse conformément aux dispositions de l’Acte
uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des
entreprises ».
Article
140 : « Dans les sociétés anonymes et, le cas échéant, dans les
sociétés à responsabilité limitée, les états financiers de synthèse annuels et
le rapport de gestion sont adressés aux commissaires aux comptes…
Ces documents sont présentés à l’assemblée
générale de la société statuant sur les états financiers de synthèse… ».
Article
269 : « Les sociétés commerciales sont tenues de déposer au greffe du
tribunal pour être annexés au registre du commerce et du crédit mobilier, dans
le mois qui suit leur approbation par l’assemblée générale des actionnaires,
les états financiers de synthèse, à savoir le bilan, le compte de résultat, le
tableau financier des ressources et emplois et l’état annexé de l’exercice
écoulé ».
Article
710 : « Le commissaire aux comptes certifie que les états financiers
sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle du résultat et des
opérations de l’exercice écoulé ainsi que de la situation financière et du
patrimoine de la société à la fin de cet exercice ».
D- Selon l’Acte
uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des
entreprises :
Article
890 : « Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux qui
auront sciemment, même en l’absence de distribution de dividendes, publié ou
présenté aux actionnaires ou associés, en vue de dissimuler la véritable
situation de la société, des états financiers de synthèse ne donnant pas, pour
chaque exercice, un image fidèle des opérations de l’exercice, la situation
financière et du patrimoine de la société, à l’expiration de cette
période ».
Question 3 : Les dispositions ci-dessus
citées des Actes uniformes font obligation aux commerçants personnes physiques
et morales d’établir tous les ans leurs états financiers de synthèse. Les états
financiers dont il s’agit doivent-ils être établis impérativement et
exclusivement selon les modèles fixés par les dispositions des articles 8 et 25
à 34 de l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités
des entreprises ou selon les règles et principes comptables du Système
comptable de l’Ouest africain révisé le 30 mai 2014 et mis application dans les
Etats de l’UEMOA ?
Question 4 : Quelle
valeur juridique peut-on accorder à un référentiel comptable mis en application
dans les Etats parties à l’OHADA et contraire au droit comptable de
l’OHADA ?
Question 5 : Le
commissaire aux comptes peut-il fonder son opinion sur un référentiel comptable
contraire au référentiel comptable de l’OHADA pour certifier les états
financiers de synthèse d’une entreprise dans l’espace OHADA ?
E- Selon l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation
des comptabilités des entreprises :
Article
8 : « Les états financiers annuels comprennent le Bilan, le Compte de
résultat, le Tableau financier des ressources et des emplois, ainsi que l’Etat
annexé.
Ils forment
un tout indissociable et décrivent de façon régulière et sincère les
évènements, opérations et situations de l’exercice pour donner une image fidèle
du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise.
Ils sont
établis et présentés conformément aux dispositions des articles 25 et 34
ci-après, de façon à permettre leur comparaison dans le temps, exercice par
exercice, et leur comparaison avec les états financiers annuels des autres
entreprises dressés dans les mêmes conditions de régularité, de fidélité et de
comparabilité ».
Question 6 : Peut-on présenter dans
l’espace OHADA des états financiers sans le Tableau financier des ressources et
des emplois (TAFIRE) mais avec un autre document appelé Tableau des flux de
trésorerie dont le contenu est différent du TAFIRE, préconisé par l’article 8
de l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des
entreprises ?».
Vu les observations de la République du Togo, de la
République BURKINA FASO et de la République
du CAMEROUN en dates respectives des 20 mai, 23 juin et 02 juillet 2015 ;
Sur le rapport de Monsieur Mamadou DEME, Juge ;
EMET L’AVIS CI-APRES :
1 - Sur la première question :
En abrogeant, à partir de sa date d’entrée en vigueur,
toutes les dispositions contraires aux siennes dans les Etats-parties,
l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des
entreprises, en son article 112, impose en effet la supériorité des règles de
l’OHADA sur les règles et les systèmes comptables existants et futurs dans les
Etats-parties au Traité.
2- Sur les deuxième et quatrième questions :
L’objectif spécifique de l’OHADA est d’harmoniser le
droit des affaires, dont le droit comptable est une des branches. Les personnes
physiques ou morales commerçantes ayant leur établissement ou leur siège social
dans un Etat partie au Traité de Port-Louis sont exclusivement régies, tant
dans leur forme que dans leur fonctionnement, par les dispositions de l’Acte
uniforme sur le droit commercial général, notamment en ses articles 13 et 15 et
de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement
d’intérêt économique, notamment en ses articles 137, 140, 269, 710 et 890.
Toutes les dispositions précitées faisant obligation
aux entreprises ayant leur siège ou leur établissement dans un Etat-partie au
Traité de Port-Louis, d’harmoniser leurs comptabilités conformément aux
dispositions de l’Acte uniforme relatif à l’organisation et à l’harmonisation
des comptabilités des entreprises, le système comptable de l’OHADA demeure le
seul applicable dans lesdits Etats, tout autre référentiel y étant dépourvu de valeur
juridique.
3- Sur les troisième, cinquième et sixième
questions :
En conséquence de ce qui précède, les états financiers
de synthèse des entreprises ayant leur siège ou leur établissement dans un Etat
partie au Traité de l’OHADA doivent être établis impérativement et
exclusivement selon les modèles fixés par les dispositions des articles 8 et 25 à 34 de
l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des
entreprises ; et l'intervention du
commissaire aux comptes doit se faire sur la base des états financiers établis
conformément au référentiel comptable de l’OHADA, tous documents financiers
établis sur d'autres bases devant faire l'objet d'un refus de certification.
Le
présent Avis a été émis par la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de
l’OHADA en sa séance du 05 novembre 2015 à laquelle étaient présents :